
Érigée en 1947, la maison d’arrêt centrale de Ngaragba est la principale prison de Bangui. Construite initialement pour 400 prisonniers, cette prison se retrouve à une surpopulation carcérale de 1672 détenus en la date du 04 septembre 2024. Parmis ces détenus, il y a 284 prévenus adultes et 10 mineurs, 813 inculpés adultes et 14 mineurs, 549 condamnés adultes et 02 mineurs a précisé un Rapport de monitoring réalisé dans la maison d’arrêt pour femme de Bimbo et la maison d’arrêt de Ngaragba par le Centre pour la population et la défense des droits de l’enfant (CPDE), avec l’appui d’Avocats sans frontières (ASF) et en partenariat avec l’ambassade de la France en Centrafrique.
Selon ce rapport :<< les conditions de détention observées dans la prison de Ngaragba sont extrêmement préoccupantes et peuvent légitimement être qualifiées d’inhumaines. Certaines cellules sont tellement peuplées que les détenus ne peuvent s’y coucher à même le sol. La situation alimentaire y est précaire, au point que de nombreux détenus sont physiquement affaiblis . Les conditions d’hygiène et sanitaires sont déplorables.>>
a- Surpopulation carcérale dramatique.
Surpeuplée à plus de 500%, les conditions de détention à l’intérieur des cellules à Ngaragba sont inhumaines. Au quartier Golo-waka par exemple plus de 500 détenus ont un problème de logement. Certains détenus doivent dormir sur le toit, car c’est le seul endroit où ils peuvent s’allonger. Certaines cellules des mineurs disposent de lits, mais la plupart n’ont pas de lits de couchage. Pour Joël Yandobet, le directeur de Ngaragba, un désengorgement de la prison de Ngaragba est nécessaire:<< les lits sont retirés des cellules pour créer de l’espace car avec les effectifs dans les cellules, les lits empêchent les détenus [de s’allonger au sol] et créent de problème entre les détenus.>> En cela s’ajoute également la question des classes sociales. En prison de Ngaragba la question des classes sociales est vraiment complexe et soulève des interrogations.L’existence des classes sociales au sens strict du terme bat son plein dans cette maison carcérale. Le rapport précise des disparités liées à l’origine sociale des détenus. Il y a une sorte d’hiérarchisation des détenus. Cette situation créé une incidence directe sur les détenus issus des milieux défavorisés et se retrouve serrer dans les cellules, ils ont un accès plus limité aux soins de santé, ce qui peut aggraver leurs problèmes de santé physique et mentale.
b- Santé des détenus
Les prisonniers de la maison d’arrêt de Ngaragba font face à une très faible capacité de prise en charge. Plus de 1600 détenus pour un seul médecin et il y a aucune ambulance pour les cas d’évacuations. Les formations sanitaires existantes dans les centres de détention peinent à répondre aux besoins sanitaires des détenus. Les mesures sanitaires ne sont pas respectées, les personnes atteintes de maladie contagieuse partagent les mêmes cellules avec d’autres détenus, les personnes atteintes de VIH/SIDA en détention ne reçoivent pas régulièrement leurs soins, il n’y a pas de cas documenté de transmission de VIH; ce qui est également le cas des détenus qui font des crises psychologiques.
Témoignage :<< Je suis âgé de 27 ans, diagnostiqué du VIH, de la tuberculose et j’ai une hernie. Avec toutes ses maladies, je n’ai pas reçu de traitement spécial et je ne mange pas assez pour pouvoir prendre mes médicaments et même dans ma cellule les autres prisonniers me repoussent et je dors à même le sol. Pas de natte, ni drap.>> (Détenu à Ngaragba)
Témoignage :<< Je souffre de l’asthme et je n’ai pas les moyens de me procurer des médicaments. Même l’infirmerie de Ngaragba n’en a pas la capacité. En plus de ça, je suis des régimes mais je ne peux pas les respecter, car je n’ai pas le choix par rapport à ma situation.>>(Détenu âgé de 61 ans).
c- Une situation alimentaire alarmante
<<La nourriture dans la prison de Ngaragba est un luxe>> ,sur 75, seuls six détenus ont répondu<<oui>> à la question << Avez-vous suffisamment à manger aujourd’hui ?>> . D’une part, la nourriture n’est servie qu’une seule fois dans la journée dans les environs de 16/17h. D’autres part, certains détenus détenus déclarent ne jamais manger la nourriture distribuée, car selon eux les repas sont malsains. D’autres détenus préparent eux-mêmes la nourriture, mais les aliments disponibles ne sont pas variés (les détenus utilisent surtout la feuille de manioc et le poisson). Certains détenus travaillent pour d’autres afin d’être payés en nourriture et en sécurité.
Témoignage :<< La nourriture dans la prison de Ngaragba est un luxe. Certains détenus en sont privés. Si tu commets une faute, on te met au cachot et tu n’as droit à la nourriture.>> Détenu de Ngaragba
Témoignage :<< Nous qui sommes amenés de province notre situation est particulièrement difficile puisque personne ne vient nous rendre visite et donc on doit patienter jusqu’à l’heure où les repas sont distribués. La majorité du temps, les repas ne sont pas bien préparés et on est obligé de les faire cuire de nouveau avant de manger pour éviter les maladies.>> Détenu transféré de province à la prison de Ngaragba.
Reporter: Majesté Melchisédeck MADIAKOA.